Une vidéo devenue virale sur TikTok met en cause un chantier de construction au Togo. Derrière l’émotion suscitée, se cache un grave problème de désinformation… et de responsabilité citoyenne.
Il aura suffi de quelques minutes de vidéo, filmée à la volée depuis un camion chargé de cossettes de manioc, pour semer le doute dans l’esprit de nombreux internautes. L’auteur, connu sous le pseudonyme Romuald Montana 1, s’arrête sur une déviation et pointe du doigt un dalot en chantier. Sans expertise, ni preuves techniques, il affirme que la structure en béton manquerait de ferraillage adéquat.

Rapidement partagée, sa vidéo provoque une vague d’indignation. Les commentaires fusent, la méfiance s’installe. Mais que s’est-il réellement passé ?
L’ouvrage ciblé par la vidéo est un dalot situé au PK 8, élément crucial pour le drainage et la durabilité de la route. Selon les responsables techniques, une anomalie a bien été détectée… mais elle n’a rien à voir avec une négligence de l’entreprise.
En réalité, malgré les dispositifs de sécurité en place, des usagers impatients et indisciplinés ont forcé le passage sur la structure fraîchement coulée, affaiblissant son tablier. Face à cette situation, les ingénieurs ont pris une décision exemplaire : démolir la partie endommagée et reprendre les travaux, en toute transparence.
C’est cette phase de reconstruction qui a été filmée et mal interprétée par Romuald Montana 1, donnant lieu à une interprétation erronée largement diffusée.
Quand TikTok devient tribunal technique

Cet incident illustre un phénomène grandissant : les réseaux sociaux deviennent des caisses de résonance pour des accusations souvent infondées. Dans le cas présent, aucune démarche n’a été entreprise pour vérifier les informations auprès des autorités ou des techniciens du chantier. Aucun journaliste, aucun ingénieur n’a été consulté.
Le résultat ? Une désinformation virale, qui ternit l’image d’un chantier conduit avec rigueur et perturbe la sérénité du travail sur le terrain.
Les conséquences de ces agissements sont graves. Outre la propagation de fausses nouvelles, ces vidéos peuvent démotiver les équipes techniques, induire le public en erreur, et même retarder l’exécution des projets. La loi togolaise est claire : diffuser de fausses informations est un délit, passible de sanctions.
Vers une citoyenneté numérique responsable
Cette affaire nous interroge collectivement. Que vaut une opinion, quand elle repose sur une méconnaissance complète du sujet traité ? Le droit à la parole est fondamental, mais il s’accompagne de devoirs : celui de vérifier les faits, de ne pas nuire, de respecter les professionnels.
À l’ère du numérique, chaque internaute est un média potentiel. Mais être un bon citoyen numérique, c’est aussi savoir quand il faut se taire, ou poser les bonnes questions, aux bonnes personnes.
Jean-Marc Ashraf